Comment évangéliser ?
Dans une
page merveilleuse de son petit livre Sagesse d'un Pauvre[1],
Éloi Leclerc, franciscain, parle de la mission :
« La chose la plus urgente, dit François
d'Assise, est de désirer avoir l'Esprit du Seigneur. Lui seul peut nous rendre
bons, foncièrement bons, d'une bonté qui ne fait qu'un avec notre être profond.
Le Seigneur nous a envoyés évangéliser les hommes. Mais as-tu réfléchi à ce que
c'est qu'évangéliser les hommes ? Évangéliser un homme c'est lui dire :
"Toi aussi, tu es aimé de Dieu dans le Seigneur Jésus."
Et pas
seulement le lui dire, mais le penser réellement. Et pas seulement le penser,
mais se comporter avec cet homme de telle manière qu'il sente et découvre qu'il
y a quelque chose de sauvé, quelque chose de plus grand et de plus noble que ce
qu'il pensait, et qu'il s'éveille ainsi à une nouvelle conscience de soi. C'est
cela lui annoncer la bonne nouvelle.
Tu ne peux
le faire qu'en lui offrant ton amitié. Une amitié réelle, désintéressée, sans
condescendance, faite de confiance et d'estime profonde. Il nous faut aller
vers les hommes. La tâche est délicate. Le monde des hommes est un immense
champ de lutte pour la richesse et la puissance. Et trop de souffrances et
d'atrocités leur cachent le visage de Dieu.
Il ne faut
surtout pas qu'en allant vers eux nous leur apparaissions comme une nouvelle
espèce de compétiteurs. Nous devons être, au milieu d'eux, les témoins pacifiés
du Tout-Puissant, des hommes sans convoitises et sans mépris, capables de
devenir réellement leurs amis. C'est notre amitié qu'ils attendent, une amitié
qui leur fasse sentir qu'ils sont aimés de Dieu et sauvés en Jésus-Christ. »
Cela suppose l'adaptation, la
compréhension de l'autre, l'empathie. Il faut se rendre proche. Le Père
Vincent Lebbe de Belgique a été un évangélisateur infatigable de la Chine dans
la première moitié du XXe siècle. Il disait : « Je serais un cadavre
si j'étais resté belge. Je me suis fait chinois avec les Chinois. »
Et l'humour s'amuse parfois de
toutes nos ambitions...
Savez-vous comment il est mort ?
Il est décédé d'une jaunisse...
Paraboles
d’un curé de campagne, Pierre TREVET, n° 120 p. 169
Editions de l’Emmanuel
[1] Desclée de Brouwer, 1959